Le Premier Ministre, Chef du Gouvernement,
Décrète :
Chapitre I : Des dispositions générales
Article 1er : Le présent décret précise les modalités de protection des eaux de surface et des eaux souterraines contre la pollution.
Article 2 : Au sens du présent décret et des arrêtés pris pour son application, les définitions suivantes sont admises :
a) « assainissement » : système qui englobe la collecte, le transport et le traitement des effluents pour en réduire ou annihiler la nocivité ;
b) « collecteurs » : conduites reliant les réseaux d’égouts aux emplacements prévus ou prévisibles pour réaliser l’épuration des eaux usées ;
c) « déchet » : tout résidu d’un processus de production, de transformation ou d’utilisation, toute substance ou tout matériau produit ou plus généralement, tout bien meuble ou immeuble abandonné ou destiné à l’abandon ;
d) « déversement d’eaux usées » : introduction d’eaux usées dans une eau de surface par canalisation ou par tout autre moyen à l’exception du ruissellement naturel des eaux pluviales ;
e) « eaux de refroidissement » : les eaux qui sont utilisées dans l’industrie pour le refroidissement en circuit ouvert et qui ne sont pas entrées en contact avec les matières à refroidir ;
f) « eaux de surface » : les eaux de ruissellement, les cours d’eau, les eaux stagnantes et plus généralement, les eaux de surface ordinaires et les eaux des voies artificielles d’écoulement ;
g) « eaux de surface ordinaires » : les eaux des voies navigables, les eaux des cours d’eau non navigables y compris leurs parcours souterrains, les ruisseaux, rivières et marigots, même à débit intermittent en amont du point où ils sont classés comme cours d’eau non navigables, les eaux des lacs, des étangs et autres eaux courantes ou stagnantes à l’exception des eaux des voies artificielles d’écoulement ;
h) « eaux souterraines » : les eaux d’infiltration et des nappes, et plus généralement toute eau qui se trouve sous la surface du sol, dans la zone de saturation en contact direct avec le sol ou le sous-sol ;
i) « eaux usées » :
- eaux polluées artificiellement ou ayant fait l’objet d’une utilisation, y compris les eaux de refroidissement ;
- eaux de ruissellement artificiel d’origine pluviale ;
- eaux épurées en vue de leur rejet ;
j) « eaux usées agricoles » : les eaux usées provenant soit des exploitations agricoles ou piscicoles, soit des établissements où sont gardés ou élevés des animaux entraînant une charge polluante globale inférieure à un chiffre maximum fixé par les règlements en vigueur et qui ne sont ni des jardins zoologiques, ni des ménageries permanentes ; le mode de calcul de la charge polluante est fixé en fonction du nombre d’animaux et des espèces auxquelles ils appartiennent ;
k) « eaux usées domestiques » :
- des eaux ne contenant que :
- des eaux provenant d’installations sanitaires ;
- des eaux provenant du nettoyage des bâtiments, tels qu’habitations, bureaux, locaux où est exercé un commerce de gros ou de détail, salles de spectacles, casernes, campings, prisons, établissements d’enseignement avec ou sans internat, hôpitaux, cliniques et autres établissements où des malades non contagieux sont hébergés et reçoivent des soins, bassins de natation, hôtels, restaurants, débits de boissons, salons de coiffure ;
- des eaux de lessive à domicile ;
- des eaux de lavage des cycles non pourvus de moteurs et des cyclomoteurs ;
- des eaux de lavage de moins de dix (10) véhicules à moteur et de leur remorques par jour ;
- les eaux usées provenant des établissements de lavage de linge dont les machines sont utilisées exclusivement par les clients ;
- ainsi que, le cas échéant, des eaux de pluies ;
- les eaux provenant d’usines, d’ateliers, de dépôts et de laboratoire occupant moins de dix (10) personnes, sauf si l’autorité compétente, pour l’octroi de l’autorisation de déversement, estime que ces eaux usées sont nuisibles aux égouts et/ou au fonctionnement normal d’une station d’épuration des eaux usées et/ou au milieu récepteur et qu’elles ne peuvent pas être classées comme eaux usées domestiques ;
l) « eaux usées industrielles » : eaux usées autres que les eaux usées domestiques et les eaux usées agricoles ;
m) « effluent » : tout rejet liquide ou gazeux d’origine domestique, agricole ou industriel, traité ou non traité déversé directement dans l’environnement ;
n) « égouts publics » : voies publiques d’écoulement d’eau construites sous forme de conduites souterraines, de rigoles ou de fossés en terre ou bétonnées à ciel ouvert et affectées à la collecte des eaux usées ;
o) « gadoues » : le produit de la vidange d’une fosse sceptique ;
p) « inspecteur de l’eau » : agent assermenté de l’administration chargée de l’eau ou des autres administrations concernées, chargé du contrôle de la qualité des eaux, de la recherche, de la constatation et des poursuites en répression des infractions aux dispositions de la loi portant régime de l’eau et de ses textes d’application ;
q) « matières polluantes » : matières susceptibles d’entraîner une pollution ;
r) « paramètre » : caractéristique permettant de définir la qualité d’une eau de surface ou souterraine et des eaux usées ;
s) « pollution » : rejet de substances ou d’énergie effectué dans les eaux souterraines, dans les eaux de surface ordinaires ou dans les voies artificielles d’écoulement directement ou indirectement et ayant des conséquences de nature à mettre en danger la santé humaine ou l’approvisionnement en eau, à nuire aux ressources vivantes et au système écologique, à porter atteinte aux agréments ou à gêner d’autres utilisations légitimes des eaux ;
t) « rejet » : introduction de substances ou de matières dans les eaux potabilisables, avec ou sans cheminement dans le sol ou le sous-sol ; il désigne soit un déversement, soit un écoulement, soit un jet ;
u) « voies artificielles d’écoulement » : rigoles, fossés ou canaux affectés à l’évacuation des eaux pluviales ou des eaux usées épurées.
Chapitre I: Des mesures générales de protection des eaux contre la pollution
Article 3 :
(1) Sont interdits, les déversements, écoulements, rejets, infiltrations, enfouissements épandages, dépôts directs ou indirects dans les eaux, de toute matière solide, liquide ou gazeuse et, en particulier, tout déchet industriel, agricole ou atomique susceptible :
- D’altérer la qualité des eaux de surface ou souterraines ou des eaux de la mer dans les limites territoriales ;
- de porter atteinte à la santé publique, à la faune et à la flore aquatiques ou sous-marines et aux animaux ;
- de mettre en cause le développement économique et touristique des régions ;
- de nuire à la qualité de la vie et au confort des riverains.
(2) Sont notamment interdits, le rejet, le déversement ou le dépôt dans les eaux de surface, dans les égouts publics ou dans les voies artificielles d’écoulement des eaux :
- de tout déchet solide, même préalablement soumis à un broyage mécanique, ainsi que des eaux ou autres fluides contenant de telles matières ou substances ;
- des huiles, lubrifiants et autres matières résultant du nettoyage et de l’entretien des véhicules à moteur, des machines à combustion et autres engins similaires ;
- des gadoues ;
- des pesticides ;
(3) La liste des substances visées aux alinéas (1) et (2) ci-dessus peut, en tant que de besoin, être précisée et complétée, après avis des administrations concernées, par arrêté du ministre chargé de l’eau.
Article 4 : Tout dépôt de matières polluantes à un endroit pouvant être entraînées par un phénomène naturel ou technologique dans les eaux de surface ou souterraines, dans les égouts publics ou dans les voies artificielles d’écoulement des eaux, est subordonné à l’autorisation préalable du Ministre chargé de l’eau.
Article 5 :
(1) Le ministre chargé de l’eau définit, en tant que de besoin, les règles d’entretien des systèmes d’épuration individuels, ainsi que celles à suivre par les organismes d’épuration, s’agissant particulièrement du nombre, de la capacité et de l’implantation des installation d’épuration destinées à recueillir et à traiter les gadoues.
(2) Les vidangeurs dûment agréés par l’administration chargée de l’eau sont tenus d’éliminer les gadoues :
- soit en les remettant à un agriculteur, aux fins d’épandage selon les règles définies par l’acte d’agrément ;
- soit en les remettant à une station d’épuration désignée à cette fin par un organisme d’épuration.
Article 6 : Le ministre chargé de l’eau peut, en fonction des conditions hydrogéologiques locales, fixer des prescriptions techniques particulières, pour l’implantation et la construction des ouvrages d’assainissement individuel ou collectif, notamment les latrines, les fosses septiques, les décanteurs-digesteurs, puisards, les lits bactériens et les tranchées filtrantes drainées.
Article 7 : Tout système de collecte, d’épuration ou de traitement des eaux usées doit être soumis à l’agrément du ministre chargé de l’eau.
Chapitre III : Des mesures spécifiques de protection des eaux contre certains déversements
Article 8 : Sont soumis à autorisation préalable du ministre chargé de l’eau après avis des autres administrations concernées, les déversements, écoulements, rejets, infiltrations, enfouissements, épandages, dépôts directs ou indirects dans les eaux des matières solides, liquides ou gazeuses quand ils garantissent l’innocuité et l’absence de nuisances, compte tenu des caractéristiques de l’effluent et du milieu récepteur.
Article 9 :
(1) L’acte accordant l’autorisation détermine les conditions générales et sectorielles auxquelles sont subordonnés les déversements, écoulements, rejets, infiltrations, enfouissement, épandages, dépôts directs ou indirects dans les eaux des matières concernées, compte tenu de l’équilibre des écosystèmes environnementaux.
(2) Il fixe également les conditions particulières devant être respectées par le bénéficiaire de l’autorisation afin d’atteindre ou de maintenir la qualité de rejet et du milieu récepteur conformément aux exigences définies à l’article 8 ci-dessus.
(3) L’acte d’autorisation précise, suivant les cas, les conditions relatives, entre autres :
- à l’implantations des points de contrôle et des dispositifs de contrôle, au fonctionnement correct des instruments de contrôle et à leur accessibilité ;
- à l’obligation de communiquer à l’autorité chargée de l’eau les résultats mesurés dans les déversements et dans les eaux réceptrices, selon une régularité déterminée ;
- aux périodes ou moments pendant lesquels les déversements sont autorisés ;
- à la séparation des différents types d’eaux usées dont le déversement est autorisé, selon qu’il s’agit des eaux usées domestiques, pluviales, industrielles, agricoles ou de refroidissement.
Article 10 :
(1) L’autorisation de déversement est délivrée pour une durée n’excédant pas cinq (5) ans, par arrêté du ministre chargé de l’eau, après enquête et avis des autres administrations concernées.
(2) Tout refus d’autorisation est motivé et notifié au demandeur.
Article 11 :
(3) Le Ministre chargé de l’eau peut, avant l’expiration de la durée pour laquelle l’autorisation de déversement a été accordée, modifier les conditions de déversement :
a) sur demande motivée du titulaire de l’autorisation ,
b) sur proposition des agents assermentés désignés et commissionnés à cet effet, si une des caractéristiques des déversements est modifiée, ou si une des conditions de l’autorisation n’est pas respectée par le titulaire de l’autorisation de déversement ;
c) à la demande des tiers intéressés.
(4) Le titulaire d’une autorisation de déversement est tenu d’informer au préalable et par écrit l’administration chargée de l’eau de tout changement des caractéristiques ou des conditions de déversement telles que prévues dans l’acte d’autorisation.
Article 12 :
(1) La demande d’autorisation de déversement est timbrée au tarif en vigueur et adressée en quatre (4) exemplaires au ministre chargé de l’eau qui fait procéder, aux frais du demandeur, à la vérification des éléments de la demande par au moins deux (2) agents assermentés.
(2) Le dossier de demande d’autorisation de déversement comporte :
- les renseignements et documents prévus dans les annexes I et II du présent décret ;
- tout renseignement complémentaire qui serait exigé par l’autorité chargée de l’eau ;
- une quittance de 10 000 (dix mille) francs Cfa.
Article 13 :
(1) La demande de renouvellement de l’autorisation de déversement est introduite (6) mois au moins avant la date d’expiration de l’autorisation en cours et suit la même procédure que la demande initiale visée à l’article 12 ci-dessus.
(2) Une visite de recollement est effectuée dans un délai maximum de soixante (60) jours après la date de réception de la demande de renouvellement par les agents de contrôles assermentés désignés et commissionnés par le ministre chargé de l’eau, pour vérifier l’application des dispositions de l’acte d’autorisation des déversements.
(3) La vérification comporte, en tant que de besoin et aux frais du titulaire de l’autorisation, les mesures effectuées sur l’effluent et la prise des échantillons nécessaires des déversements, écoulements, rejets et des eaux réceptrices et leurs analyses dans les laboratoires du ministère chargé de l’eau ou à défaut, dans les laboratoires agréés par le ministre chargé de l’eau.
(4) Un procès-verbal de visite est rédigé à la diligence de l’administration chargée de l’eau et envoyé au titulaire de l’autorisation de déversement qui peut, dans un délai maximum de vingt (20) jours après la notification, adresser ses observations sur ledit procès-verbal. Si les conditions du déversement sont jugées conformes à celles prévues dans l’acte d’autorisation, le ministre chargé de l’eau prononce le renouvellement de l’autorisation. Dans le cas contraire, le ministre chargé de l’eau met en demeure le titulaire de l’autorisation de s’y conformer dans un délai n’excédant pas trois (3) mois.
Article 14 : L’autorisation accordée peut être modifiée ou retirée soit à la demande du titulaire ou des tiers intéressés, soit à l’initiative de l’Administration, soit de plein droit dans le cas prévu par l’acte d’autorisation.
Chapitre IV : Des dispositions diverses et finales
Article 15 : Les personnes physiques ou morales propriétaires d’installations raccordées aux réseaux d’égouts publics ou privés, aux voies artificielles d’écoulement des eaux ou aux stations d’épuration des eaux usées, sont assujetties au paiement d’une taxe d’assainissement, suivant les modalités fixées par la loi des finances.
Article 16 : Un arrêté conjoint des ministres chargés respectivement de l’eau et de la normalisation fixe les normes et conditions de déversement des eaux usées.
Article 17 :
(1) Le contrôle des déversements visés par le présent décret est exercé sous l’autorité du ministre chargé de l’eau, par des agents assermentés des administrations chargées respectivement de l’eau, de la santé publique, de l’environnement et le cas échéant de l’agriculture et de l’élevage, des pêches et des industries animales.
(2) Il fait l’objet d’un procès-verbal régulier et signé, suivant le modèle figurant à l’annexe III du présent décret.
Article 18 : Les propriétaires d’installations de déversement établies antérieurement à la date de publication du présent décret doivent, dans un délai maximum d’un (1) ans, prendre toutes les dispositions afin d’assurer au milieu récepteur les caractéristiques conformes à la réglementation et aux normes en vigueur.
Article 19 : Des arrêtés du ministre chargé de l’eau fixent, en tant que de besoin, les modalités d’application du présent décret qui sera enregistré et publié suivant la procédure d’urgence, puis inséré au journal officiel en français et en anglais.
Le Premier Ministre,
Chef du Gouvernement
Peter MAFANY MUSONGE