L'Assemblée Nationale a délibéré et adopté,
Le Président de la République promulgue la loi dont la teneur suit :
Article 1er.- La présente loi fixe le statut des membres du Conseil Constitutionnel, en application de l’article 51 (5) de la Constitution.
Chapitre I : De la nomination
Article 2.- Les membres du Conseil Constitutionnel sont choisis parmi les personnalités de réputation professionnelle établie. Ils doivent jouir d’une grande intégrité morale et d'une compétence reconnue. Ils sont nommés par décret du Président de la République dans les conditions prévues à l’article 51 de la Constitution.
Chapitre II : De la prestation de serment
Article 3.- (1) Avant leur entrée en fonction, les membres du Conseil Constitutionnel prêtent serment au cours d’une cérémonie solennelle devant le Parlement réuni en congrès.
(2) ils prêtent le serment suivant, la main gauche posée sur la Constitution et la main droite levée et dégantée devant le drapeau national: « Je jure de bien et fidèlement remplir mes fonctions, de les exercer en toute impartialité dans le respect de la Constitution, de garder le secret des délibérations et des votes, de ne prendre aucune position publique, de ne donner aucune consultation sur les questions relevant de la compétence du Conseil ».
(3) Acte est donné de la prestation de serment par le Président de l’Assemblée Nationale et procès-verbal en est dressé par le Secrétariat Général de l'Assemblée Nationale.
Article 4.- Tout manquement à ce serment est sanctionné conformément à la législation en vigueur.
Chapitre III : Des obligations
Article 5.- (1) Les membres du Conseil Constitutionnel doivent s'abstenir de tout ce qui pourrait compromettre l'indépendance et la dignité de leurs fonctions. Ils s'interdisent, en particulier pendant la durée de leur fonction :
- de prendre une position publique ou de consulter sur des questions ayant fait ou étant susceptibles de faire l'objet de décisions du Conseil Constitutionnel ;
- de plaider ou de participer à un arbitrage;
- d'occuper au sein d'un parti ou d'une formation politique, d'une association partisane ou syndicale, tout poste de responsabilité ou de direction et, de façon plus générale, de faire apparaître de quelque manière que ce soit leur appartenance politique ou syndicale ;
- d'exciper ou de laisser user de leur qualité dans des entreprises financières, industrielles, commerciales ou dans l'exercice des professions libérales ou autres et, d'une façon générale, d'user de leur titre pour des motifs autres que ceux relatifs à l'exercice de leur mandat
(2) Ils sont astreints à l'obligation de réserve et de discrétion professionnelle même après la cessation de leur mandat
Article 6.- Chaque membre du Conseil Constitutionnel s'engage à respecter les obligations prévues par la présente loi afin de préserver l'indépendance et la dignité de sa fonction.
Article 7.- Les membres du Conseil Constitutionnel tiennent le Président du Conseil Constitutionnel informé des changements survenus dans leurs activités extérieures au Conseil Constitutionnel.
Chapitre IV : Des incompatibilités
Article 8.- (1) Les fonctions de membre du Conseil Constitutionnel sont incompatibles avec :
- la qualité de membre du Gouvernement;
- la qualité de membre du Conseil Économique et Social;
- la qualité de membre de la Cour Suprême;
- l'exercice de tout mandat électif ou de tout autre emploi public, civil ou militaire;
- toute autre activité professionnelle privée pouvant affecter son honorabilité, son impartialité, son intégrité, sa neutralité et son honnêteté intellectuelle;
- de toute fonction de représentation nationale.
(2) Les fonctionnaires nommés au Conseil Constitutionnel sont placés en position de détachement. Leur avancement d'échelon, de classe ou de grade est automatique.
(3) Les membres de l'Assemblée Nationale et du Sénat nommés au Conseil Constitutionnel sont réputés avoir opté pour ces dernières fonctions s'ils n'ont pas exprimé au Président de la République une volonté contraire dans les huit (8) jours suivant la publication de leur nomination.
(4) Tout membre du Conseil Constitutionnel candidat à un mandat électif est considéré comme démissionnaire.
Chapitre V : Des immunités, avantages et privilèges
Article 9.- Les membres du Conseil Constitutionnel sont inamovibles. Leur mandat ne peut être ni renouvelé, ni révoqué.
Article 10.- (1) Sauf cas de flagrant délit ou de condamnation définitive, aucune mesure d’arrestation ou de détention d'un membre ne peut intervenir sans autorisation du Conseil Constitutionnel.
(2) Dans les cas autres que ceux visés à l’alinéa 1 ci-dessus, le Ministre chargé de la Justice saisit le Président du Conseil Constitutionnel dans les meilleurs délais.
(3) Le Conseil Constitutionnel statue sous huitaine à la majorité des deux tiers des membres le composant et par un vote à bulletin secret.
(4) La décision motivée doit être notifiée au Ministre chargé de la Justice et communiquée sans délai au Président de la République, au Président de l'Assemblée Nationale et au Président du Sénat.
Article 11.- Les membres du Conseil Constitutionnel sont protégés contre les menaces, outrages, attaques de quelque nature que ce soit dont ils peuvent être l'objet dans l'exercice de leurs fonctions.
Article 12.- Aucun membre du Conseil Constitutionnel ne peut être inquiété, poursuivi, recherché, arrêté, détenu ou jugé en raison des opinions ou votes émis par lui dans l'exercice de ses fonctions.
Article 13.- Le Président et les membres du Conseil Constitutionnel bénéficient des avantages, traitements et indemnités fixés par décret du Président de la République.
Article 14.- Les membres du Conseil Constitutionnel sont détenteurs, durant leur mandat, d'une carte professionnelle frappée aux couleurs nationales.
Article 15.- (1) Un insigne distinctif est porté par les membres du Conseil Constitutionnel au cours des cérémonies officielles et en toute circonstance où ils ont à faire connaître leur qualité.
(2) Une cocarde leur est attribuée pour l'identification de leur véhicule.
Article 16.- Lors des cérémonies officielles et des audiences, les membres du Conseil Constitutionnel arborent une tenue d'apparat dont la description est fixée par le règlement intérieur du Conseil Constitutionnel.
Article 17.- Les caractéristiques de l'insigne, de la cocarde et de la carte professionnelle sont déterminées par le règlement intérieur du Conseil Constitutionnel.
Chapitre VI : De la cessation des fonctions
Article 18.- Le Conseil Constitutionnel, statuant à la majorité des deux tiers de ses membres, peut d'office ou à la demande de l'autorité de désignation, mettre fin, au terme d'une procédure contradictoire, aux fonctions d'un membre qui aurait méconnu ses obligations, enfreint le régime des incompatibilités ou perdu la jouissance de ses droits civils et politiques, conformément aux modalités fixées par son règlement intérieur.
Article 19.- (1) Un membre du Conseil Constitutionnel peut démissionner par une lettre adressée au président dudit Conseil qui en informe sans délai le Président de la République et l'autorité de désignation.
(2) Cette démission prend effet à compter de la date de dépôt de la lettre visée à l'alinéa 1er ci-dessus.
Article 20.- (1) Le Conseil Constitutionnel constate, le cas échéant, à la majorité absolue des membres le composant, la démission d'office de celui de ses membres convaincu de l'exercice d'une activité, ou qui aurait accepté une fonction, un mandat électif incompatible avec sa qualité de membre du Conseil Constitutionnel ou qui n'aurait plus la jouissance de ses droits civils et politiques. Cette démission vaut exclusion.
(2) Le Président du Conseil Constitutionnel en informe le Président de la République et l'autorité de désignation dans un délai de quinze (15) jours.
Article 21.- Les règles posées à l'article 20 ci-dessus sont applicables aux membres du Conseil
Constitutionnel définitivement empêchés par une incapacité physique permanente dûment constatée par un collège médical désigné par le Conseil Constitutionnel.
Article 22.- (1) En cas de décès, de démission, d'incapacité physique permanente ou d'exclusion d'un membre du Conseil Constitutionnel, un nouveau membre est nommé conformément aux dispositions de l'article 51 (3) de la Constitution. Il achève le mandat commencé.
(2) Toutefois, à l'expiration de ce mandat, il peut être nommé pour un nouveau mandat de neuf (9) ans s'il a occupé ses fonctions de remplacement pendant moins de trois (3) ans.
(3) En cas de démission ou d'exclusion d'un membre du Conseil Constitutionnel, celui-ci ne peut postuler à une fonction élective avant un délai de trois (03) ans, à compter de la date de sa démission ou de son exclusion.
Article 23.- (1) Dans l’intérêt de l'Institution, en cas de mise en cause du Président par un acte de procédure pénale, celui-ci se met en congé dans un délai de quinze (15) jours en vue d'assurer sa défense. Le Conseiller-Doyen assure alors son intérim jusqu'à l'issue de ladite procédure.
(2) Toutefois, si cet intérim excède six (6) mois, le Président de la République peut procéder à la nomination d'un nouveau Président.
(3) Les dispositions de 1'alinéa 1er ci-dessus s'appliquent mutatis mutandis aux autres membres du Conseil Constitutionnel.
Article 24.- En cas de vacance de la Présidence du Conseil Constitutionnel par démission, décès ou toute autre cause, le Président de la République nomme un nouveau Président, conformément aux dispositions de l'article 2 de la présente loi.
Chapitre VII: Disposition finale
Article 25.-La présente loi sera enregistrée et publiée suivant la procédure d'urgence, puis insérée au Journal Officiel en français et en anglais.
Yaoundé, le 21 avril 2004
Le Président de la République,
(é) Paul BIYA